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Paroles d'agriculteur

Fidéliser ses salariés, c'est possible

Installée en 1995 à Héberville, village typique du Pays de Caux en Seine-Maritime, la famille Moonen cultive, avec leurs 12 salariés, des céréales, des betteraves, du colza, du lin et des pommes de terre sur une surface de 630 ha. Tous ensemble, ils cultivent également une ambiance et des conditions de travail de qualité, propices à l’épanouissement des hommes et femmes qui composent cette belle entreprise. En 28 ans d’existence, la SCEA Moonen-van Meer n’a connu qu’une seule démission.

Une exploitation à haute-fidélité

Depuis 28 ans, Marianne et Jean Moonen font prospérer leur exploitation agricole avec l’aide de salariés fidèles et investis. Le respect, la confiance et le confort au travail sont les maîtres mots de leur gestion d’équipe.


Il y a des dates que l’on n’oublie pas. Celle du 2 juin 1995 en est une pour la famille Moonen. Au printemps 1995, Marianne et Jean Moonen ont respectivement 22 et 25 ans. Ils se fréquentent depuis quelques mois seulement lorsqu’ils décident de quitter leur Hollande natale pour s’installer en tant que jeunes agriculteurs à Héberville, en Seine-Maritime. Le 2 juin 1995, ils signent la reprise d’une exploitation agricole auprès de deux frères, futurs retraités. À ce moment-là, ils parlent à peine français. L’exploitation reprise emploie sept salariés. Conserver ces emplois fait partie du contrat. Le pari est osé pour ces jeunes entrepreneurs hollandais, mais leur énergie positive, leur convivialité et leur ouverture d’esprit ont permis la fidélisation et l’épanouissement des salariés. Tous ont poursuivi leur carrière auprès d’eux, jusqu’à leur retraite. À leur départ, chacun d’entre eux a été remplacé.

La gestion des ressources humaines

Depuis 1995, l’entreprise a prospéré et s’est agrandie. Elle exploite aujourd’hui 630 ha de cultures de céréales, colza, betteraves, lin et plants de pommes de terre. L’effectif a également augmenté. Ils sont désormais 12 salariés à temps plein sur l’exploitation, dont Max, l’un des quatre enfants de Marianne et Jean. 12 travailleurs auxquels il faut ajouter 4 saisonniers pour la période d’arrachage des pommes de terre. Ces intérimaires reviennent chaque année et sont accueillis dans les mêmes conditions que les autres salariés. Ils sont considérés comme faisant partie de l’équipe et restent fidèles à chaque saison. Luc, le fils aîné de Marianne et Jean, installé depuis fin 2022, participe aussi aux travaux de l’exploitation. Juridiquement, les salariés dépendent, presque tous, d’un groupement d’employeurs, car l’exploitation de la famille Moonen - van Meer est parta-gée en plusieurs sociétés. Ce groupement d’employeurs simplifie la gestion administrative des ressources humaines. Chez M. et Mme Moonen, 
le turn-over n’existe pas, ou si peu. Depuis 28 ans, ils ont connu une seule démission dans leur équipe, en raison d’une réorientation professionnelle de la personne concernée. Alors, quel est le secret de cette fidélité ? Marianne nous propose une réponse simple et pleine de bon sens : « Ici, on prend en compte le bien-être des salariés. On travaille avec eux, aussi dur qu’eux, dans le respect et la confiance, on réalise les mêmes tâches qu’eux ». Elle ajoute : « On ne se voit pas comme étant leurs patrons, on préfère entretenir un esprit d’équipe. On a appris à parler français à leur contact. On évolue ensemble ». Cette proximité ne se traduit pas uniquement dans les mots. Les pauses café du matin et du début d’après-midi sont des rituels partagés par tous. Ils sont des moments d’échange indispensables pour parler de tout et de rien, mais aussi pour organiser la journée.

La qualité de vie et des conditions de travail

Le bien-être et la qualité de vie au travail sont également des marqueurs forts auxquels Marianne et Jean sont très attachés. Tous les efforts sont faits pour offrir de bonnes conditions aux salariés : un réfectoire confortable et bien équipé, des sanitaires impeccables, une mise à disposition de matériel moderne et aux normes (la climatisation des tracteurs est contrôlée tous les ans), une attention particulière portée sur les postes de travail les plus pénibles (triage, épuration…) et sur la sécurité, des installations pensées pour gagner en efficacité et en praticité, etc.

La rémunération 

Le partage et le confort sont les éléments d’un triptyque qui serait bien bancal sans, plus prosaïquement, une rémunération juste. Autre cheval de bataille de Marianne et Jean : valoriser correctement le travail. Par un salaire légèrement supérieur aux standards du secteur (toujours versé le 2 de chaque mois), par le paiement de toutes les heures supplémentaires, par des primes récurrentes versées à dates fixes (qui peuvent être équivalentes à un 13e mois), par des primes exceptionnelles lorsque cela est encouragé par les mesures fiscales et sociales (prime PPV* en 2022, prime PEPA** en 2021 et 2020)…
Les vêtements de travail (côtes, chaussures, gants et protections spécifiques) sont aussi renouvelés chaque année. À ces considérations pécuniaires, Marianne est heureuse d’ajouter quelques cadeaux lors du pot de fin d’année : un vêtement brodé au nom de l’entreprise et un panier garni complètent la liste du Père Noël.

La formation 

Les bases sont posées, les salariés sont satisfaits, investis et performants. Mais comment entretenir cette fidélisation sur du long terme ? À ce sujet, Max a un avis : « Les salariés sont formés et informés ».
Pour les formations, tous les salariés sont conviés, quel que soit le sujet : sauveteur secouriste du travail, éco-conduite, habilitation électrique, certiphyto, sécurité incendie… La généralisation des formations permet une montée en compétences et une polyvalence des salariés. Pour l’information, cela passe par une certaine transparence dans la gestion de l’exploitation. Le choix d’un nouveau matériel est partagé avec les salariés. Si nécessaire, le prix fait partie de la discussion. De même, le coût des réparations ou des pièces de rechange n’est pas tabou. 
Enfin, les conséquences potentielles d’une casse ou d’une erreur sont expliquées sans fard et sans affect : « Tout le monde peut se tromper, moi la première, cela ne sert à rien de 
s’emporter en cas d’erreur
» aime à rappeler Marianne. Cette implication des salariés tend à les responsabiliser et à favoriser le partage des informations, bonnes ou mauvaises. Une erreur bégnine sera ainsi rattrapée ou prise en compte par le collègue qui poursuit le chantier ; une erreur plus impactante, telle qu’un « mauvais triage », sera détectée avant qu’elle n’affecte les clients de l’entreprise.

La solidarité  

Enfin, le maître mot pour la satisfaction des salariés reste une organisation anticipée, partagée et équitable des chantiers tout au long de l’année. Concrètement, les salariés travaillent en binôme ou trinôme selon leurs affinités. Ils effectuent des missions variées grâce à leur polyvalence. Un équilibre entre les tâches plaisantes et plus contraignantes est recherché. L’entraide est de mise lors des périodes où la charge de travail est forte. C’est à nouveau Max qui résume cette organisation en une phrase : « Tous les salariés sont sur un pied d’égalité ». 
Finalement, Marianne et Jean ont naturellement mis en place une organisation et une gestion des ressources humaines fondées sur une formule assez simple : « se mettre à la place du salarié et rechercher sa satisfaction ». Cette formule est aujourd’hui reprise dans bon nombre de manuels de management sous les termes d’empathie et de bienveillance. D’ailleurs, si vous vous donnez la peine d’en ouvrir un, vous y trouverez les 7 points qui caractérisent un manager bienveillant : donner du sens au travail, fixer des objectifs réalistes, être transparent, encourager et remercier, écouter, accorder de l’autonomie et de la confiance, donner le droit à l’erreur.
Au jeu des ressemblances, il faut bien reconnaître que Marianne et Jean sont probablement des managers bienveillants. 

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